Depuis quelques jours déjà j’avais cette drôle de sensation d’être épiée, suivie… comme si quelqu’un surveillait le moindre de mes faits et gestes. Trois fois rien, c’est pourquoi j’essayais de faire comme si de rien n’était. Je continuais ma routine de New Yorkaise, le temps de préparer mon prochain voyage. Je n’avais pas encore choisi la destination, j’en avais tellement en tête. Heureusement que les missions humanitaires choisissaient parfois pour moi. Mais même si j’adorais les voyages, j’appréciais également les quelques mois que je passais à New York entre deux voyages. Ça me permettait de revoir mon père et mes amis.

Un soir, en rentrant à pied du boulot, cette drôle de sensation fut encore plus insistante. Je ne pouvais m’empêcher de me retourner régulièrement pour être certaine qu’il n’y avait personne qui me suivait. A mi-chemin de chez moi, je fis semblant bifurquer dans une autre rue, mais m’arrêtait à l’entrée, coller contre le mur pour voir si quelqu’un cherchait à suivre le même chemin que moi. J’avais bien entendu vérifié juste avant que personne ne se trouvait dans la rue. Alors quand un homme habillé de couleur sombre tourna dans la rue, je ne me fis pas prier pour le plaquer au mur. Il chercha à s’enfuir mais ayant appris à me défendre pour les besoins de mes voyages que je faisais souvent seule, je réussi à le retenir. Quand il arrêta enfin de se débattre, je le questionnai sur qui il était et pourquoi il me suivait. Il m’avoua alors être détective privé mais ne voulu pas tout de suite m’avouer pour qui il travaillait. Mais tenant à ses parties intimes, il ne mit pas longtemps à cracher le morceau pour éviter un coup de genou bien placé. Alors comme ça le père de Quincy avait engagé un détective privé pour enquêter sur moi ? Avait-il des doutes sur la prétendue relation qu’on lui servait, son fils et moi, en prétendant que j’étais sa petite amie alors qu’en réalité j’étais juste une bonne amie à lui. Qu’est-ce que le détective privé avait déjà eu le temps de lui révéler ? Depuis quand me suivait-il ? Dans la surprise du nom de Monsieur Barnes, j’avais relâché ma prise et le détective en avait profité pour filer. Mes questions resteraient donc sans réponse. Je finissais donc mon chemin, contrariée. Il allait falloir que je parle de ça à Quincy et vite !

Dès le lendemain matin, j’envoyais un SMS à mon ami pour être certain qu’il ne soit pas à l’université pour dispenser l’un de ses cours de littérature. Apparemment non. Parfait ! Après une bonne douche, j’attrapais mes clés de voiture et fonçais en direction de Brooklyn. Une fois en bas de l’immeuble, j’enfonçais mon doigt sur l’interphone puis m’empressai de monter les escaliers. A peine de deux coups sur la porte, qu’elle s’ouvrait déjà. Je pris une mine impatiente et entrais chez lui sans attendre son autorisation. « Il faut qu’on parle Quincy ». Oui ok, dis comme ça on dirait que c’est lui qui a fait une bêtise. Mais en même temps je me voyais mal débarquer au travail de son père, exiger de le voir pour lui demander d’enquêter sur moi. Ma seule solution était de demander à Quincy d’intercéder auprès de son père. Je jetais mon sac sur le canapé et le regardait d’un air sérieux. On repassera pour la politesse.

Quincy avait le nez dans des papiers. Contrairement à ce que beaucoup d’idiots pensent, comme c’était le cas de son père, le boulot de prof ne s’arrête pas une fois les élèves en vacances. Ce serait bien si c’était le cas. Non, à la place il lisait et analysait des bouquins, encore et encore. Il écrivait une nouvelle thèse. Sa table à manger était recouverte des feuilles qu’il avait écrites. Il allait rédiger cela au propre plus tard, sur un ordinateur. Quiconque verrait ça ne reussirait sûrement pas à s’y retrouver, il fallait l’avouer, c’était le bordel. Pourtant Quincy savait où était chaque feuille dont-il avait besoin. Il bossait comme un fou, et pour dire vrai, il ne sortait que lorsqu’il avait des courses à faire, et pour emmener ses chiens courir. Et parfois pour se détendre un peu, mais il aimerait vraiment finir sa thèse d’ici la fin des vacances, même si c’était mal parti. L’espoir fait vivre à ce qu’on dit. Pourtant son père n’aidait pas, il l’avait encore une fois invité à un dîner mondain pour qu’il puisse l’exposer comme un trophée. En public il ventait les mérite de son fils, professeur en poste à l’université de New York, et diplômé de Columbia, petit génie des analyses littéraire. En privée, il lui répétait à quel point il trouvait cela inutile. Il allait devoir demander à Lindsey de l’accompagner, pour faire croire qu’il est hétéro à son cher père.

En parlant de la brune, quand l’interphone sonna et qu’il entendit la voix de sa chère fausse petite copine il ouvrit la porte d’entrée et attendit qu’elle débarque d’elle même dans l'appartement du professeur. En attendant de la voir arriver il partit dans la cuisine et fit un peu de place sur la table et sourit en la voyant entrer. Il le perdit vite, haussant un sourcil aux mots de son amie. Avait-il fait quelque chose de mal? Il cherchait ce qu’il avait fait la dernière fois qu’ils s’étaient parlé, mais il n'avait aucune idée de comment il avait pu la blesser.

“J’ai fait quelque chose de mal? Parce que si c’est le cas, je suis désolé, et surtout, j’aimerais savoir quoi parce que je vois pas!”

Une fois qu’il avait dégagé un coin de table il partit chercher les deux cafés et l’invita à s’assoir en déposant les deux boissons chaude sur la table. Si dehors il faisait plutôt chaud, ici, ça allait. Il y avait une très grande différence entre la température sur le balcon et celle à l'intérieur, il faut dire qu’avec son salaire, Quincy ne s’était pas gếné pour faire installer une clim dans son appartement.

Je n’avais pas réfléchi à l’impact de mes paroles lorsque j’étais rentrée “brutalement” dans son appartement sans même lui dire bonjour. En voyant son sourire disparaître et en attendant ses paroles, je réalisais tout de suite ma bêtise. Bien sur que lorsqu’on balance un “on doit se parler” c’est jamais bon généralement… J’aurais pu trouver une variante plus sympathique en commençant par un bonjour et puis en lui disant plutôt que j’avais besoin de lui parler de quelque chose” Quel boulet ! Je m’en voulais instantanément. Alors, plutôt que d’accéder à son proposition de m’asseoir pour boire le bon café chaud qu’il venait de préparer, je fonçais vers lui. “Haaa non non non ! Désolée mon Quincy… je voulais pas que tu crois ça !”. Une fois à sa hauteur j’attrapais son visage dans mes mains et déposais un énorme bisou sur sa joue gauche. “Bien sur que tu n’as rien fait de mal !”. J’allais ensuite prendre place en face de lui, le visage bien plus enjouée. Avec un grand sourire, je le remerciais pour le café. Je soufflais légèrement dessus, avant de porter la tasse à mes lèvres. Malgré la chaleur qu’il faisait dehors, un café était toujours agréable, surtout dans un appartement climatisé. “En fait le problème c’est… ton père.”. Ok, c’était vague dit comme ça. Mais avant qu’il n’est le temps de s’imaginer x ou y choses, j'enchainais. “Apparemment il a engagé un détective privé pour se renseigner sur moi.”. Oui, il avait osé. Je ne savais pas vraiment qui de Quincy ou moi devait être le plus vexé des agissements de son père. Quincy car son père ne lui faisait pas assez confiance pour croire qu’il faisait le bon choix en terme de femme pour partager sa vie. Moi, car apparemment pas assez crédible pour qu’il croit ce que je lui disais durant les soirées où j’accompagnais Quincy. Ou alors, il avait tout simplement des doutes sur notre relation ? Avait-il commencé à comprendre qu’on lui jouait la comédie en se faisant passer pour un couple ? J’espérais que non. Non pas que je voulais rester le restant de ma vie la fausse petite amie de mon ami, mais j’avais vraiment peur de comment son père pouvait réagir le jour où il serait “obligé” de lui avouer qu’il aime les hommes et non les femmes.